Marché du travail
Banques : une relation-client réinventée
Dans le secteur bancaire, en dématérialisant l’essentiel de la relation client, l’intégration de l’IA devrait avoir un impact significatif sur le métier de conseiller commercial et favoriser les qualités relationnelles.
Publié le 10/07/2018 • Mis à jour le 08/03/2022
Un conseiller bancaire automatisé sous forme d’un robot conversationnel ou chatbot ? Comme pour les transports ou la santé, « des avancées spectaculaires » sont attendues dans le secteur bancaire grâce à l’intelligence artificielle (IA), selon les experts de France Stratégie. Avec l’IA, certaines tâches, dont les plus répétitives, seront amenées à disparaître, notamment celles liées à la collecte de données, qui seront « optimisées ou accélérées ». En revanche, l’IA peut conduire à des besoins de spécialisation, « pour apporter une expertise de pointe au client », mais également au développement d’un statut de généraliste, « capable d’orienter le client vers le bon spécialiste et de résoudre ses problèmes ».
La tendance est à une dématérialisation de l’essentiel de la relation, caractérisée par la popularité croissante des banques en ligne* (Monabanq, B for Bank, Boursorama, Fortuneo Bank, etc.). Selon une enquête du cabinet Deloitte (1), seuls 15% des clients consultent leur solde en agence, contre 77% sur le site Internet de leur banque. Un des principaux usages de l’IA dans le secteur bancaire est donc la mise en place d’agents conversationnels ou « chatbots », qui permettent, en principe, de répondre aux questions des clients sur la base de milliers de conversations analysées et enregistrées. Ces programmes font miroiter la promesse d’une interface plus disponible et plus rapide pour les clients des banques, notamment pour les opérations à distance. Ainsi, Orange Bank, service lancé en novembre 2017 qui utilise l’IA pour gérer la relation avec ses clients, fait figure de pionnier en France avec le Crédit Mutuel-CIC.
Pourcentage des clients consultant leur solde sur le site de leur banque
77
Selon une enquête du cabinet Deloitte, seuls 15% des clients consultent leur solde en agence, contre 77% sur le site Internet de leur banque.
La banque de détail en première ligne
Les premiers impactés par ces transformations sont les chargés de clientèle particuliers ou conseillers bancaires. Ils représentent près de 35 000 salariés, soit 18% des effectifs (2). Les changements apportés par l’IA vont profondément transformer leur métier. Dans son étude pour l’Observatoire des métiers de la banque, le cabinet Athling met en lumière comme activités les plus impactées celles relatives au respect des évolutions réglementaires, juridiques et fiscales, spécifiques au secteur bancaire (3) : « ces activités se trouveront améliorées grâce à une veille plus pertinente et à des outils de recommandations plus avancés et personnalisés », note l’étude, à l’image du moteur de recherche juridique Doctrine.fr. Elles permettront un accès « à la demande » à ces informations. La construction de profils de clients à l’aide d’outils d’IA permettra également aux conseillers d’instruire plus rapidement les demandes de crédit, ou d’identifier plus efficacement les risques financiers comme la fraude fiscale ou le blanchiment.
Une meilleure connaissance des clients
Selon France Stratégie, en facilitant le métier de conseiller bancaire et diminuant le volume de connaissances requises en les rendant plus disponibles, l’IA peut également être une incitation à faire évoluer les conseillers bancaires vers une plus grande connaissance des clients. « Les conseillers pourraient alors assumer davantage de responsabilités dans la gestion de leurs clients, en consacrant plus de temps à recommander des placements ou des sources de financement », notent les chercheurs. Dans ce scénario, ce sont les compétences sociales et décisionnelles qui seront mises en valeur, et « les agences bancaires pourraient être amenées à privilégier des formations aux capacités de dialogue ou de négociation », précise les auteurs du rapport.
On devrait également assister à une demande accrue pour des personnels capables de résoudre les problèmes complexes des clients. Dès lors, « le besoin de compétences techniques pourrait diminuer au profit de compétences relationnelles, de sens du conseil et d’analyse globale d’une situation », précisent les auteurs. Enfin, s’ils notent qu’« il existe un risque d’augmentation de l’intensité du travail, avec la disparition des tâches plus simples et plus « reposantes » », les chercheurs de France Stratégie estiment néanmoins que « le scénario le plus probable dans le secteur bancaire est un scénario d’évolution progressive, tendanciel ».
N.S.