Marché du travail
Le chômage peut baisser en même temps que les créations d’emplois
Parfois l’emploi repart. Parfois non. Les économistes ont quelques difficultés en 2015 interpréter les rebonds ou non rebonds de l’emploi dans différents pays. Le cas des Etats Unis et de l’Espagne surprennent, celui de la Grande Bretagne fait réfléchir.
Publié le 07/03/2016 • Mis à jour le 08/03/2022
Les Etats Unis intriguent. Si le chômage baisse, les créations d’emploi régressent également. Cela donne des résultats étonnants avec par exemple un mois de janvier où toutes les prévisions tablaient sur 185 000 créations d’emplois et qu’il n’y en a eu « que » 151 000. Ce qui n’a pas empêché le chômage de baisser et de passer en dessous de la barre des 5%. Une première depuis février 2008. Une première explication, selon le correspondant du Monde tient « au fait que beaucoup de sans-emploi disparaissent des statistiques…. Théoriquement, il y a un peu moins de 8 millions de chômeurs aux Etats-Unis. Mais si l’on tient compte de ces facteurs de sous-emploi, leur nombre grimpe à 16 millions, a récemment affirmé le président de la commission des services financiers de la Chambre des représentants, le républicain Jeb Hensarling ».
Selon lui 6 millions d’Américains sont forcés de travailler à temps partiel parce qu’il n’y a rien d’autre de disponible et ne sont pas comptabilisés dans les chiffres du chômage.
Si l’on en croit des cabinets indépendants cités par La Tribune, le chômage serait même de 12 % aux Etats Unis. Car il faudrait aussi comptabiliser les chômeurs en quête d’emploi mais qui ne s’inscrivent pas car cela ne leur donnerait droit de toute façon à aucune hésitation. Si on les intègre dans les statistiques, le taux de chômage grimpe de 5% à 8,6 % et si l’on intègre ces salariés en temps partiel contraint pour calculer une estimation élargie du chômage, on parvient à un taux de chômage de 12,1%. Bien sur ces analyses sont critiquables mais ce qui surprend plus, c’est qu’après cinq ans ou presque de croissance continue aux Etats-Unis, les créations d’emplois fléchissent autant et le chômage réel est aussi élevé.
L’Espagne étonne. En 2015, l’économie espagnole a vu le nombre de chômeur reculer de 678 200 et a créé 525 100 emplois. C’est assez impressionnant et la plupart des analystes mettent en avant les réformes du marché du travail. Romaric Godin dans La Tribune va plus loin et prend le contre-pied. D’abord en relativisant : la crise a été terriblement violente en Espagne seuls 30% des emplois détruits pendant la crise ont pour l’instant été « récupérés » et on est sur un rythme de « retour à la normale » plus que sur un rebond économique. Ensuite le taux de chômage reste élevé et le pays est profondément ancré dans le chômage de masse : 7,6% % au deuxième trimestre 2007 contre 20,9% actuellement. Enfin, comme aux Etats Unis si le chômage baisse, les créations d’emplois n’explosent pas autant : cela signifie que ce sont des chômeurs qui sont sortis du système de comptabilisation qui expliquent une bonne partie de la baisse spectaculaire de 2015. Et il ne faut pas oublier que la population active diminue en Espagne ce qui explique près de 20% de la baisse du chômage. Le « miracle espagnol » ressemble en fait assez à la situation américaine
La Grande Bretagne bat des records. En 2015, 505 000 créations d’emplois et un taux de chômage qui est tombé à 5,2%. Chaque mois la Grande Bretagne bat un record en termes d’emploi poussant l’emploi vers un niveau record et relèvent Les Echos, elle « compte aujourd’hui plus de 31 millions d’emplois, un nouveau record. C’est presque 5 millions de plus qu’en France, alors que la population totale est légèrement inférieure outre-Manche ».
Le changement semble être désormais dans la qualité des emplois créés, là où la Grande-Bretagne était souvent montrée du doigt (temps partiels, travail indépendant et précaire, contrats zéro heure etc….). Cela semble ne plus être le cas car selon Les Echos « deux tiers des postes créés au cours de l’année écoulée sont des temps complets et presque neuf sur dix sont des emplois salariés. Signe du dynamisme de l’économie, les start-up représentent une part croissante des nouveaux emplois. Sur la période 2014-2015, 1 million de postes ont été créés par des entreprises nées il y a moins d’un an, montre une étude de l’Enterprise Research Centre. Un autre record absolu ».
Les contrats « zéro heure » sont toutefois toujours plus nombreux. Ces contrats où les salariés n’ont pas d’heure minimale de travail représentent 2.4% de la population active. Pour bien les comprendre, il faut lire l’étude d’Eudoxe Denis pour L’institut de l’Entreprise.
JPG